Économie du libre
Le logiciel libre est-il économiquement viable ? Si oui, à quelles conditions et par quels moyens?
La question se pose de savoir quels sont les moyens par lesquels le logiciel libre peut assurer économiquement sa pérennité, puisque qu’il se prive généralement de faire payer ses licences.
[Cet article reprend, en partie, le contenu de: «Le logiciel libre: modèles économiques», présentation du Groupe d’utilisateurs du libre à Blois, décembre 2015, conformément à la licence CC BY SA].
Les services
On ne vend plus la licence, mais les services: adaptation du logiciel, formation, assistance. C’est le cas, par exemple, d’Open-ERP, de MySQL de Sugar CRM et de Red Hat.
Open-ERP
«Le prix d’un ERP est composé à 25% du prix des licences. Le logiciel libre fait perdre ce revenu, mais cela est compensé par des économies marketing, des coûts de développement plus faibles, un développement plus rapide, un développement de la notoriété plus rapide, et un coût d’acquisition client plus faible», selon Fabien Pinkhaers, directeur général, Open-ERP
Synolia
Synolia produit Sugar CRM. «La société vit de la vente de services: formation, assistance, développements spécifiques. L’intérêt du logiciel libre réside dans une large diffusion», selon Stéphane Calimodio, responsable CRM, Synolia.
Partage des sources
Une communauté développe une suite de logiciels qui sert de base à des développements spécifiques et/ou vente de services. Exemples : développeurs bénévoles travaillant pour des projets du type LibreOffice, Mozilla, etc.
On gagne de l’argent avec le logiciel libre en vendant les services annexes au produit: adaptation, formation, assistance.
Mais pourquoi ne pas protéger le logiciel et vendre aussi les licences?
«Pour gagner en fiabilité, les bugs sont plus rapidement trouvés et corrigés par la communauté que par une équipe interne. Pour intéresser plus de clients potentiels, puisque le produit est gratuit et disponible (sur le Web généralement). Mais il faut que le logiciel intéresse une frange suffisante de personnes, sinon c’est de l’argent jeté par les fenêtres. », selon Jean Molliné, développeur PHP.
Vente de l’hébergement et de l’assistance
Certains logiciels libres demandent un serveur, mais rien n’empêche de les télécharger sans frais et de les installer sur un serveur. Toutefois, le développeur peut avoir mis en place une entreprise d’hébergement facultatif et de service.
C’est le cas de BigBlueButton avec Blindeside Networks, de Moodle qui fait 6 millions par année avec ses 85 partenaires, de WordPress.org et de WordPress.com.
Vente de modules supplémentaires
Un moyen de produire des revenus et de vendre des licences pour des modules supplémentaires, un hébergement dans le nuage, ou la possibilité d’un plus grand nombre d’utilisateurs, etc.
Les modules supplémentaires sont le choix notamment de Disruptive Innovations de Daniel Glazman, pour BlueGriffon, éditeur web html5, basé sur le moteur Gecko de Mozilla.
Limite du nombre utilisateurs sans frais
La tarification au nombre d’utilisateurs (au dela de 25 ou de 50, est le choix notamment d’Odoo, pour son logiciel EPR de gestion de l’entreprise.
À noter qu’Odoo maintient la gratuité sans limite dans l’éducation; un choix marketing qui peut être judicieux puisque certaines entreprises de logiciels non libres le font aussi – pas tous malheureusement.
Autres moyens : publicité, dons, financement participatif et financement associatif.
Publicité
La publicité peut se retrouver sur le site web, sous la forme de logiciels ajoutés par défaut à l’installation, etc. Cela peut irriter les utilisatrices et utilisateurs qui doivent cependant comprendre que des revenus doivent être produits, sinon le projet ne durera pas. C’est pourqoi onpréfèrera d’Autre smoyens,t els que ceux vus précédemment.
Dons
Les dons sont assez rares, mais ils existent. Chaque établissement d’enseignement supérieur, qui économise en licences en utilisant un logiciel libre, pourrait reverser 5 à 10 % de ces économies en don ou en contribution au développement. Par ailleurs un projet tel que Wikipédia parvient à recueillir suffisamment de dons pour se maintenir.
Financement participatif
Le Crowdfunding peut être utile, mais a ses exigences. Ainsi les fonds recuillis sont rendus aux donateurs si l’objectif n’est pas attient.
Financement associatif
Le financement se fait sur les cotisations des adhérents et l’appel aux subventions ou aux dons. C’est le cas, par exemple, d’OpenStreetMaps.
En conclusion
Grâce à sa communauté open source, le logiciel est entretenu activement par de nombreux développeurs. Ceci permet d’adapter le logiciel rapidement aux besoins grandissants des clients et de leur fournir des nouvelles applications innovantes. Les coûts de commercialisation sont aussi réduits.
D’un point de vue purement économique, le logiciel libre est donc viable s’il rejoint un large public, en vendant des services, des modules supplémentaires ou en recevant des dons.
N’est-ce pas une cercle vertueux que plus le logiciel libre sera utilisé dans l’enseignement supérieur pour ses qualités d’accessibilité et d’interopérabilité, plus large sera le public touché et plus le logiciel libre sera viable?
Pierre Cohen-Bacrie
Conseiller pédagogique, TIC
Collège Montmorency